Mort pour la France et Adoption par la Nation

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« Mort pour la France »

Le 22 décembre 1914, le député Joseph Thierry dépose une proposition de loi « afin que l’État civil enregistre, à l’honneur du nom de celui qui a donné sa vie pour le pays, un titre clair et impérissable à la gratitude de tous les Français », le mot décédé devant être remplacé par la mention « Mort pour la Patrie ».

Cette loi reçoit un accueil unanime des parlementaires, mais le député Joseph Lagrosillère demande que la mention « Mort pour la Patrie » soit remplacée par celle de « Mort pour la France ».

C’est finalement la loi du 2 juillet 1915 qui crée la mention officielle de « Mort pour la France », loi modifiée par celle du 28 février 1922.

L'attribution de cette mention est clairement définie. C'est une opération relative à l'état civil, régie par les articles L 448 et L 492 bis du Code des pensions militaires et des victimes de guerre. Elle est liée aux circonstances du décès. « L’acte de décès d’un militaire des armées de terre ou de mer, tué à l’ennemi, mort de blessures ou de maladie contractée en service commandé, ou encore des suites d’accidents survenus en service ou à l’occasion du service, en temps de guerre, de tout médecin, ministre du culte, infirmier, infirmière des hôpitaux militaires et formation sanitaires, ainsi que toute personne ayant succombé à des maladies contractées au cours de soins donnés aux malades ou blessés de l’armée, de tout civil ayant succombé à la suite d’actes de violence commis par l’ennemi devra, sur avis favorable de l’autorité militaire, contenir la mention : "Mort pour le France" ».

Lorsque l’acte de décès a été dressé aux Armées au plus près  des combats, la mention est portée dans le texte même de l’acte qui est ensuite transcrit à la mairie du dernier domicile de la victime. Lorsqu’elle ne figure pas dans l’acte, elle est portée en marge avec la date de l’attribution par l’Officier de l’état civil, après avis de l’autorité militaire.

Mention en marge de l'acte

Mention en marge de l’acte

Pour les disparus ou les victimes non identifiées, elle est inscrite dans le jugement déclaratif de décès établi par le Tribunal d’instance du lieu du dernier domicile.

Transcription d'un acte déclaratif de décès

Transcription d’un jugement déclaratif de décès

On pourrait donc s’attendre à ne voir figurer sur le Monument aux morts que les participants à la Grande guerre officiellement reconnus « Mort pour la France » et dont la mention est portée sur leur acte de décès. Il en est tout autrement.

Sur les 160 inscrits sur le monument, 146 ont été officiellement reconnus "Morts pour la France" tel qu'en témoigne leur acte de décès (seuls 143 figurent dans le fichier de "Mémoire des hommes" et seulement 120 dans la liste établie par le Ministère des pensions qui toutefois n'inclue pas les marins). Il semble que certains combattants, qui décédés à leur domicile pendant ou immédiatement après la guerre des suites de blessures ou maladie imputables au service, n'aient pas été reconnus "Mort pour la France" mais tout de même inscrit sur le Monument aux morts dans un légitime souci de reconnaissance.

La loi du 27 avril 1916 créa en outre un Diplôme d'honneur nominatif, portant en titre " Aux morts de la Grande guerre, la patrie reconnaissante", diplôme attribué par le Ministre des anciens combattants et victimes de guerre et remis aux familles de chaque combattant, quel que soit son grade. Au format 43 sur 25,5 composé et gravé par Charles Coppier il représente la Marseillaise de Rude telle qu’elle figure sur l’un des piliers de l’Arc de triomphe.

Une loi du 25 octobre 1919 stipule que le nom des combattants morts pour la France soit inscrit sur un registre déposé au Panthéon et que chaque commune recevrait un "Livre d'or" de ses victimes. La réalisation de ces livres d'or fut confiée au Ministère des Pensions récemment créé. En 1931, comme en témoigne une correspondance de ce ministère au Maire de Tonnay-Charente, ce projet n'était toujours pas abouti. Devant son ampleur, il fut finalement abandonné. Toutefois, des listes nominatives des Morts pour la France de toutes les communes ont été établies par le Ministère des pensions, travail préparatoire à la réalisation des Livres d'or qui ne virent jamais le jour. Ces listes sont conservées par les Archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine et consultables sur Internet (voir"Liens").

 

« Adoption par la Nation »

La France adopte les orphelins dont le père a été tué à l’ennemi ou est décédé de blessures ou maladies contractées du fait de la guerre. Cette adoption est prononcée par le tribunal. Ces orphelins deviennent ainsi « Pupilles de la Nation » et la mention « Adopté par la Nation » est alors portée en marge de leur acte de naissance.

Cette mention a-t-elle été parfois oubliée ? Comment certains orphelins ont-ils pu être adoptés par la Nation alors que leur père n’a pas été officiellement reconnu « Mort pour la France » ?

Mise à jour le Mercredi, 20 Août 2014 14:04